03 juillet 2025
En perspective du PLFSS 2026, la CNAM a remis en juillet un rapport comportant de nombreuses propositions pour un durcissement de la régulation. Parmi ces propositions, deux visent directement l’optique : l’interdiction de la publicité et l’espacement de la durée entre les renouvellements d’équipement.
Le ROF a, en même temps que les pouvoirs publics, pris connaissance la semaine dernière du rapport « Charges et produits » présenté par l’Assurance maladie en perspective des débats qui se tiendront à l’automne sur la prochaine loi de financement pour la sécurité sociale (PLFSS 2026).
Ce rapport remis annuellement par la Caisse nationale d’Assurance maladie (CNAM), dresse généralement un état des lieux de la branche et formule quelques recommandations au législateur. Mais il s’inscrit cette année dans un contexte inhabituel marqué par le niveau préoccupant de la dette publique française, les incertitudes soulignées par la Cour des comptes sur le financement de l’Assurance maladie à l’horizon 2027, à quoi s’ajoute, pour cette année, un dépassement anticipé de 1,3 milliards de l’objectif national de dépense pour cette branche.
Auditionné au Parlement, le ministre de la Santé a déjà prévenu que « tout le monde » serait sollicité pour des efforts, et les 60 propositions formulées par la CNAM dans ce rapport « charges et produits », plus prescriptif et remarqué que les années précédentes, confirment une volonté d’économies qui pourrait se faire au détriment de plusieurs secteurs – dont l’optique et, nous le signalons puisque beaucoup de nos professionnels accueillent un corner, l’audioprothèse.
En particulier, la CNAM a cette année, en plus de 60 propositions, formulé des « options » qu’elle « soumet aux débat public », dont celle-ci : « Revoir le périmètre des contrats responsables, notamment en allongeant la fréquence de renouvellement des lunettes à niveau de correction inchangé. Interdire la publicité pour les lunettes de vue et les audioprothèses ». Et cette autre, pour laquelle l’audioprothèse est visée, mais pas – pour l’heure ? – l’optique : « De manière complémentaire aux baisses de tarifs, instaurer un mécanisme de régulation sectorielle (type « clause de sauvegarde ») pour les secteurs à forte rentabilité, qui se déclencherait lorsque la régulation tarifaire est temporairement insuffisante. »
Le ROF est bien sûr hostile à ces mesures, et regrette que la CNAM fasse ici siennes deux demandes des OCAM ces dernières années.
La surprise n’est pas totale, s’agissant de la fréquence des renouvellements pour laquelle le Directeur de la CNAM avait déjà pris position, à l’été 2024, devant la mission sénatoriale sur les complémentaires santé, par laquelle le ROF avait été auditionné et devant laquelle il avait fait valoir ses arguments.
La reprise par la CNAM de la demande d’une interdiction de la publicité, portée par les OCAM et certains syndicats des secteurs concernés, est nouvelle et rend maintenant inévitable un débat sur le sujet.
Le ROF emploiera toute son énergie à défendre une publicité qui participe à rendre notre secteur hautement concurrentiel et a historiquement permis à nos enseignes de dédramatiser le port des lunettes. Il faudra lever des malentendus manifestes – si la publicité permet à chacun d’entre nous de faire connaître au patient les produits et services qu’il offre, ce n’est évidemment pas elle qui fait s‘accroître le marché, mais le vieillissement de la population et l’exposition aux écrans.
Nul doute qu’il faudra aussi réfuter des affirmations à l’emporte-pièce – elles ont déjà commencé, certains dénonçant un « consumérisme médical » – alors que nos équipements ne peuvent être délivrés que sur ordonnance, que 85 % des porteurs renouvellent par nécessité et que 81 % ont un reste à charge – de tout de même 131 euros en moyenne par paire de lunettes.
Et il faudra rester vigilant et mobilisés devant cette idée, progressivement amenée par la CNAM dans le débat, que tout secteur jugé « trop » rentable doit être régulé – par des baisses de tarifs, voire par une contribution temporaire (« la clause de sauvegarde » – qui existe ailleurs, pour le médicament).
Alors que, comme le confirme une nouvelle enquête, les déserts ophtalmologiques explosent et que l’accès aux soins visuels se raréfient dans les territoires, le ROF, plus que jamais, appelle les pouvoirs publics à ne pas casser ce qui fonctionne dans la filière.
Si ce n’est pas pour notre secteur le point le plus saillant du rapport « charges et produits », il est difficile de ne pas noter les développements circonstanciés de la CNAM sur la décarbonation des prescriptions, et notamment des dispositifs médicaux.
Ces pages font en effet suite au rapport du Shift project présenté le 17 juin, qui consacre (p.161 et suivantes) tout un pan de sa réflexion au secteur de l’optique médicale. Parmi d’abondantes recommandations de ce rapport du Shift project, dont certaines exigent une forte adaptation du secteur, on note :
Un document à lire, à tout le moins, d’autant qu’il a attiré l’attention des pouvoirs publics alors que ces derniers s’inscrivent depuis décembre 2023 dans la mise en œuvre de la feuille de route de planification écologique du système de santé.